Jean Marais

Jean Alfred Villain-Marais, dit Jean Marais, est un acteur français, né le à Cherbourg et mort le à Cannes ; il est également metteur en scène, écrivain, peintre, sculpteur, potier et réalisait la plupart de ses cascades. Il reçut en 1993 un César d'honneur.

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Jean Marais
Jean Marais en 1948, studio Harcourt.
Nom de naissance Jean Alfred Villain-Marais
Naissance
Cherbourg, France
Nationalité Française
Décès
Cannes, France
Profession Acteur
Films notables La Belle et la Bête
Le Bossu
Le Capitan
Le Capitaine Fracasse
trilogie Fantômas

Biographie

Signature.

Enfance

Jean Alfred Villain-Marais est officiellement[1] le fils d'Alfred Villain-Marais (1882-1959) et d'Aline Marie Louise Vassord (1887-1973).

Jean Marais a quatre ans lorsque sa mère alsacienne décide de quitter son mari qui exerce la profession de vétérinaire. Elle part vivre à Paris avec ses deux fils. Comme elle est souvent absente, le petit Jean lui écrit alors des lettres mais c'est sa tante qui inscrit l'adresse sur l'enveloppe. Il comprend plus tard que c'est parce que sa mère, kleptomane, effectue des séjours en prison. Il est élève au lycée Condorcet.

Jean Marais ne reverra son père que près de quarante ans plus tard ; sa mère lui avouera un peu plus tard que son vrai père était en fait son parrain, présenté comme étant son oncle, Eugène Houdaille[2].

Jean Marais a un fils adoptif, Serge Ayala (1942-2012, suicide), qui eut une brève carrière de chanteur en 1965-1966[3]. Dans l'émission L'Invité du jeudi présentée par Alain Cances diffusée le sur Antenne 2, Jean Marais conteste cette information et annonce qu'il a reconnu cet enfant[4]. D'abord jockey, Serge Alaya se lancera dans la chanson en 1966, avant de jouer aux côtés de Jean Marais dans le film Sept hommes et une garce (1967)[5].

Débuts

Il démarre comme figurant en 1933 dans les films de Marcel L'Herbier. Celui-ci cependant ne lui donne jamais sa chance en tant qu'acteur.

En 1937, il échoue au concours d'entrée au Conservatoire et étudie chez Charles Dullin, au théâtre de l'Atelier. Il y découvre les pièces classiques, où il tient des rôles de figuration qui lui permettent de financer ses cours.

Jean Cocteau

Jean Marais en 1942 (photo studio Harcourt)

Sa rencontre avec Jean Cocteau en 1937, lors d'une audition pour la mise en scène de sa réécriture d'Œdipe Roi, marque le véritable lancement de sa carrière. Le cinéaste et dramaturge tombe amoureux du jeune acteur, qui devient son amant, puis sera son ami, jusqu'en 1963 et la mort de Cocteau.

En 1937, Cocteau donne à Jean Marais un premier rôle muet dans Œdipe Roi : il y joue le rôle du Chœur. Dans cette pièce, Jean Marais apparaît vêtu de bandelettes, costume créé par Coco Chanel, amie de Cocteau et cela fait jaser. Son rôle est muet car Jean ne maîtrise pas encore assez sa voix pour le théâtre, la cigarette l'aide à la transformer, au risque d'altérer sa santé. Puis la même année, Marais obtient le double rôle de Galaad et du Galaad faux dans Les Chevaliers de la Table ronde.

En 1938, Cocteau lui écrit rapidement une pièce sur mesure : Les Parents terribles qui lui donne la reconnaissance de la profession.

1942 le voit aux côtés de Viviane Romance dans l'adaptation par Christian-Jaque de Carmen.

En 1943, il joue un Tristan moderne dans L'Éternel Retour de Jean Delannoy. Il a une vive altercation avec le critique artistique Alain Laubreaux, de l'hebdomadaire collaborationniste Je suis partout, qui le qualifie de « L'homme au Cocteau entre les dents » et affirme qu'il ne doit son statut qu'aux hautes relations de Cocteau.

Idole d'une génération, il monte en 1944 Renaud et Armide de Jean Cocteau, mais la pièce est victime d'une cabale, vraisemblablement menée par les collaborationnistes, et les représentations sont rapidement annulées ; Marais gagne encore en popularité et devient un symbole de résistance à l'occupant. Le , il monte avec Alain Cuny Andromaque de Racine au Théâtre Édouard VII mais la pièce est aussitôt interdite. Jean Guehenno donne dans son Journal des années noires une note d'un journal dont il tait le nom sur cette interdiction : « La milice française est soucieuse de la protection intellectuelle de la France ainsi que de la moralité publique. C'est pourquoi le chef régional de la milice française pour l'Ile-de-France a prévenu le préfet de police qu'elle allait s'opposer à la représentation de la pièce scandaleuse de MM. Jean Marais et Alain Cuny, jouée actuellement au théâtre Édouard VII. M. le préfet de police a pris un arrêté interdisant immédiatement la pièce »[6].

Après la Libération de Paris durant laquelle il se joint aux combats, en , il s'engage dans l'armée française et rejoint la 2e DB du général Leclerc. Il y sert, accompagné de son célèbre chien Moulouk (qu'il a trouvé attaché en forêt de Compiègne en 1940 et adopté, et qui est apparu dans le film L'Éternel Retour), au sein du 501e régiment de chars de combat, ravitaille en vivres et carburant les chars, et y conduit une jeep baptisée Célimène, puis des camions. On salue sa bravoure, étant un des seuls conducteurs à rester au volant de son véhicule lors du bombardement de sa colonne à Marckolsheim en Alsace (modestement, il tiendra à relativiser dans ses interviews ultérieures cette attitude courageuse, l'expliquant par une volonté à ce moment d'être tranquille au chaud pour déguster des confitures de cerises)[7]. Il reste sous les drapeaux jusqu'en .

Jean Marais en 1947, photographié par Carl Van Vechten.

À la fin de la Seconde Guerre mondiale, Cocteau écrit pour lui La Belle et la Bête, un film très difficile à tourner, et auquel personne ne croit. Marais entre alors dans la légende.

En 1946, il joue dans la pièce L'Aigle à deux têtes de Cocteau, puis en 1949, dans l'un des plus célèbres films de Jean Cocteau, Orphée.

En 1952, il entre brièvement à la Comédie-Française. Il y est à la fois comédien, metteur en scène et décorateur. C'est la première fois qu'une telle fonction est donnée à un comédien aussi jeune (il a moins de quarante ans). Jean Marais quitte la Comédie-Française après une altercation avec l'administrateur.

Il tourne auprès de certaines des plus grandes vedettes féminines françaises de l'époque : Les Chouans avec Madeleine Robinson, Ruy Blas avec Danielle Darrieux, Aux yeux du souvenir avec Michèle Morgan, film qui scelle ses retrouvailles avec Jean Delannoy ; ce dernier l'engage à nouveau au cinéma plus tard dans La Princesse de Clèves avec Marina Vlady.

Changement de registre

Dans les années 1950, il s'éloigne de Cocteau.

Jean Marais, photographié au milieu de la troupe des Blue Bell Girls du Lido de Paris, arrivant à l'aéroport d'Amsterdam-Schiphol le 13 avril 1965.

Il tourne pour de grands cinéastes dont Luchino Visconti, Jean Renoir, Sacha Guitry.

1954 est l'année de son plus grand succès au cinéma avec Le Comte de Monte Cristo, seconde adaptation par Robert Vernay du roman d'Alexandre Dumas.

Il partage en 1956 avec Ingrid Bergman la vedette d'Elena et les Hommes de Jean Renoir.

Luchino Visconti l'engage en 1957 pour son film Nuits blanches et l'année suivante, sur scène, dans la pièce Deux sur la balançoire de William Gibson, avec Annie Girardot.

En 1959, il tourne une dernière fois avec Jean Cocteau, Le Testament d'Orphée dans lequel il joue Œdipe. Jean Marais quitte Cocteau pour un danseur américain, George Reich, qui vient de jouer dans le film La Garçonne.

Jean Cocteau meurt en 1963.

En 1959, André Hunebelle lui propose de tourner Le Bossu avec Bourvil. C'est le début d'une nouvelle carrière. Il est toujours aussi populaire, et ce nouveau registre, plus familial, lui permet de séduire un nouveau public encore plus important.

Il retrouve à nouveau Bourvil et André Hunebelle dans Le Capitan puis enchaîne une longue série de films de cape et d'épée dont Le Capitaine Fracasse de Pierre Gaspard-Huit en 1961 ou encore Le Masque de Fer d'Henri Decoin en 1962.

Il connaît un nouveau triomphe au cinéma avec la série des Fantômas (1964-1967) dans lesquels il joue le double rôle du journaliste Fandor et de Fantômas. Il y effectue souvent ses propres cascades. Mais bien que le public afflue dans les salles et que le nombre d'entrées explose, Jean Marais estime que ces films n'ont pas le prestige des précédents. De plus, après avoir dû partager la vedette avec Bourvil, le voilà désormais presque relégué au rang de premier second rôle par Louis de Funès qui interprète le rôle du commissaire Juve. Il semble délaisser pour un temps le grand écran et privilégie dès lors le théâtre.

En 1969, il connait sa 1re expérience d’interprétation à la télévision dans la pièce de Cocteau Renaud et Armide.

En 1970, Jacques Demy lui offre un grand rôle dans Peau d'âne dans lequel il donne la réplique à Catherine Deneuve.

Fin de carrière

Jean Marais en 1993, à la 18e cérémonie des César.

En 1973, il retrouve le succès pour sa huitième et ultime collaboration avec André Hunebelle : Joseph Balsamo. Il apparaît dans l'émission de télévision littéraire Italiques pour parler de Cocteau - Moretti, l'âge du verseau de Louis Nucera[8].

Jean Marais se retire dans les Alpes-Maritimes, d'abord à Cabris où il passe une quinzaine d'années (un boulevard de cette commune porte son nom) puis à Vallauris où il pratique, dans un style très fortement influencé par Cocteau, la poterie, la sculpture tout en poursuivant son activité théâtrale. Il y ouvre un magasin et même une galerie d'art grâce à un couple d'amis potiers. En 1976, il ouvre également un magasin où il vend ses poteries et ses peintures à Paris au 91, rue Saint-Honoré à l'enseigne Jean Marais, potier. La boutique est tenue par l'actrice Mila Parély qui joue le rôle de la sœur de la Belle dans La Belle et la Bête[9].

Vers 1980, il monte le spectacle Cocteau Marais et devient le gardien de l'œuvre de Cocteau, sans en avoir légalement les droits.

En 1988, il met en scène Bacchus de Cocteau, n'ayant pas pu y jouer à sa création en 1951.

En 1988, il enregistre la chanson On n'oublie rien, de François Valéry et Gilbert Sinoué, chez Franceval.

Au cours des années 1980 et 1990, il poursuit son abondante carrière au théâtre, avec de grands rôles comme celui de Don Diègue dans Le Cid, et joue aussi dans des pièces telles Le Roi Lear, Hernani ou Les Monstres sacrés. On le retrouve, plus discrètement, au cinéma, en particulier dans Parking de Jacques Demy et Les Misérables du XXe siècle de Claude Lelouch. Il tourne un dernier film, Beauté volée, de Bernardo Bertolucci en 1995, et au théâtre en 1997, interprète le berger Balthazar dans L'Arlésienne, aux Folies Bergère.

Dans une interview accordée à Bernard Pivot, Jean Marais précise n'avoir jamais fait de figuration dans Drôle de drame et avoir été remplacé à la dernière minute. Pourtant il suffit de visionner le film pour voir qu'il a bien joué le rôle d'un passant habillé en costume et haut de forme qui est assommé par un brigand travaillant pour le tenancier chinois du B&B où M. et Mme Molyneux se sont installés. Soit Jean Marais avait oublié, soit il ne voulait pas en parler.

Au cours d'un entretien télévisé pour Cinéma, Cinémas en 1987, après avoir évoqué sa violente altercation avec Alain Laubreaux, laquelle inspirera une scène du film Le Dernier Métro, Jean Marais confie à Raoul Sangla sa surprise de n'avoir jamais été engagé par François Truffaut, réalisateur dudit long métrage, et cinéaste régulièrement présent à chacune des représentations de l'acteur sur scène[10].

Il écrit quelques livres dont ses Mémoires, Histoires de ma vie. Il est aussi l'auteur de L'Inconcevable Jean Cocteau, de contes et de poèmes.

Sculpteur, il réalise, entre autres, une évocation du Passe-murailles, installée rue Norvins à Montmartre, devant la maison de Marcel Aymé, auteur de la nouvelle éponyme.

Jean Marais meurt d'une insuffisance cardiaque à Cannes le . Il est enterré dans le petit cimetière de Vallauris, la ville des potiers, où il a passé les dernières années de sa vie.

Sa tombe y est profanée dans la nuit du 7 au [11].

Postérité

À Montmartre, près de la basilique du Sacré-Cœur, une place Jean-Marais est inaugurée le .

Une exposition « L'éternel retour » lui est consacrée à Montmartre, la même année, afin de saluer sa mémoire, dix ans après sa mort.

Au début des années 1950, il avait fait l'acquisition d'une grande propriété à Marnes-la-Coquette, mitoyenne au parc de Saint-Cloud, où il fit édifier un long pavillon encadré de deux courtes ailes, « subtil mariage de classique français et de colonial anglais », et aménager un atelier dans un ancien pavillon de musique du XVIIIe siècle[12].

Plus tard, il acquit une maison dans l'arrière-pays provençal[13].

Jean Marais n'a jamais caché son homosexualité[14]. Au cinéma, il est aussi l'un des rares, avec Jean-Paul Belmondo, à avoir presque toujours exécuté lui-même ses propres cascades.

Filmographie complète

Distinctions

Récompenses

Nominations

Théâtre

Comédien

Metteur en scène

Disque

  • David et Goliath, Disque le petit ménestrel, 1968.
  • Le Capitan, Disque Festival, 1971.
  • On n'oublie rien, Disque Franceval, 1988.

Bibliographie

  • Jean Marais, Histoires de ma vie, Paris, Albin Michel, 1975.
  • Collectif, Jean Marais, album photos, Paris, éditions PAC, 1984.
  • Jean Cocteau, Lettres à Jean Marais, Paris, Albin Michel, 1987.
  • Serge Tardy, Jacqueline Peycelon et Sylvie Midoux Jean Marais, L'œuvre Plastique, Edisud, 1987. (ISBN 978-2-85744-356-8)
  • Hommage à Jean Marais, héros romantique d'aujourd'hui, sous la direction de Daniel Marchesseau, cat. exp. Musée de la Vie romantique, Paris, 1999.
  • Bertrand Meyer-Stabley, Cocteau-Marais, les amants terribles, Paris, Éditions Pygmalion, 2009.
  • Christian Soleil, Jean Marais, Le Dernier héros, Paris, éditions Édilivre, 2014.
  • Michel Mourlet, "Une visite à Jean Marais", chapitre d'Une Vie en liberté, Éditions Séguier, 2016.

Box-office France

Prix et récompenses

Publications

  • Contes
  • Histoires de ma vie - 1975
  • L"inconcevable Jean Cocteau - 1993

Notes et références

  1. Dans sa dernière biographie, Jean Marais révèle qu'il est né d'une liaison de sa mère avec un homme marié, de la bourgeoisie cherbourgeoise.
  2. Jean Marais, Histoires de ma vie, page 228.
  3. « Serge Ayala », sur Discogs (consulté le 12 novembre 2019)
  4. Photo de Serge Villain-Marais. Il peut y avoir eu confusion entre "adoption" et "reconnaissance". Par facilité de langage, les termes "fils adoptif" ont pu être utilisés au lieu de "fils reconnu", mais dans les deux cas, adoption ou reconnaissance, cela a créé un lien de filiation entre Jean Marais et Serge Alaya
  5. L'Écho républicain de la Beauce et du Perche, 20 juillet 1966 : "Serge Ayala débute dans la chanson et le cinéma et n'aime pas que l'on dise qu'il est le fils adoptif de Jean Marais"
  6. Jean Guehenno, Journal des années noires, Folio Gallimard no 517, 2002, p. 410
  7. Sandro Cassati, Jean Marais une histoire vraie, , 240 p. (ISBN 978-2-8246-4999-3, lire en ligne), p. 99.
  8. Italiques, deuxième chaîne de l'ORTF, le 28 septembre 1973.
  9. Télé 7 Jours no 838, semaine du 5 au 11 juin 1976, pages 52 et 53, article de Georges Hilleret : "Parce qu'il ne joue plus assez, Jean Marais ouvre, à Paris, un magasin de poteries".
  10. Thomas Boujut, « Cinéma Cinémas - Jean Marais - 1987 », (consulté le 20 mai 2017).
  11. « La tombe de Jean Marais pillée au cimetière de Vallauris - France 3 Provence-Alpes-Côte d'Azur », France 3 Provence-Alpes-Côte d'Azur, (lire en ligne, consulté le 20 mai 2017).
  12. Demeures et jardins de vacances / Du côté de Marnes-La-Coquette "Plaisir de France" no 201, juin 1955, p. 12-13
  13. Françoise de Valence, « Une maison à cœur ouvert », dans Maison et Jardin no 320, février 1986, p. 110 à 114 ; une des photos de l'intérieur par Gérard Martinet montre dans la bibliothèque un grand portrait en pied de Jean Cocteau peint par A. Quellier.
  14. Jean Marais, Histoires de ma vie, Albin Michel, 1975
  15. inamediapro site de l'INA, consulté le 19 février 2010

Liens externes

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