Vitamine B6

La vitamine B6 est une vitamine hydrosoluble représentée par trois formes principales : la pyridoxine, le pyridoxal, et la pyridoxamine.

Structure de la pyridoxine.

Présente dans une grande variété d'aliments végétaux et animaux, elle est nécessaire au bon fonctionnement cellulaire, en particulier le système nerveux et cutané.

Le déficit isolé en B6 est rare. Il est le plus souvent associé à des carences vitaminiques multiples, en particulier les autres vitamines B. Ces déficits s'observent notamment chez les alcooliques chroniques.

Historique

Dans les années 1930, des régimes alimentaires expérimentaux provoquent, chez le rat, des troubles cutanés et neurologiques. Ces troubles ne pouvaient être traités par aucun nutriment connu, sauf par extrait d'une levure particulière[1].

En 1934, Paul Györgi montre que le facteur curatif est une vitamine, dite B6. Dans les années qui suivent la vitamine B6 est isolée et cristallisée, et ses formes chimiques sont élucidées (à partir d'un noyau pyridine). Le terme pyridoxine est proposé par György en 1936[2].

Les premières observations de déficit en vitamine B6 chez l'homme ont été faites sur des nourrissons, alors qu'ils étaient allaités par un lait trop stérilisé à l'autoclave, ou enrichis en huile de palme[3]. D'où, dans les années 1950, d'intenses recherches sur la biochimie de cette vitamine, dont des expériences menées sur des volontaires subissant des régimes carencés[1].

D'autres déficits ont été observés chez les patients tuberculeux de cette époque traités par isoniazide, médicament qui est aussi un antagoniste de la pyridoxine.

Durant les années 1960-1980, les rôles de la vitamine B6 sont précisés dans le métabolisme des acides aminés, la synthèse de l'hème, et dans l'activité des neurotransmetteurs[1].

Formes

La vitamine B6 est connue sous trois formes principales, convertibles entre elles :

  1. pyridoxine (PN), forme primaire (chimiquement un alcool) sous laquelle la vitamine B6 est présente dans les végétaux et compléments vitaminés.
  2. pyridoxal (PL), forme dérivée (chimiquement un aldéhyde) existant dans les cellules vivantes.
  3. pyridoxamine (PM), qui se distingue des deux précédentes par un groupe amine.

Les formes biologiquement actives sont des esters :

L'acide 4-pyridoxique (PA) est un catabolite excrété par voie urinaire.

Rôles

Biochimie

Le phosphate de pyridoxal, forme biologiquement active, intervient en tant que cofacteur enzymatique dans plus d'une centaine de réactions du métabolisme des acides aminés, notamment de transamination, désamination et décarboxylation.

Il permet la conversion du glycogène en glucose (Glucose-1-Phosphate) par la Glycogène phosphorylase, et il joue un rôle dans le métabolisme des lipides.

La vitamine B6 participe également à la transformation du tryptophane en vitamine B3, et à la biosynthèse de la sérotonine. En 2018, le rôle de la B6 dans le métabolisme cellulaire reste encore en partie inexploré. Ce sujet fait l'objet de nombreuses recherches, avec des répercussions dans la production de nouveaux médicaments et plantes OGM[4].

Physiologie

Dans les produits animaux, la B6 est majoritairement sous forme d'esters, alors que dans les produits végétaux, elle est sous forme de pyridoxine laquelle est moins biodisponible[5].

La B6 est absorbée au niveau du jéjunum et métabolisée au niveau des mitochondries des cellules hépatiques. Le surplus est lié à des albumines dans le plasma sanguin, et est excrété dans les urines. La demi-vie d'élimination est de l'ordre de 15 à 20 jours. Il n'existe pas de forme de stockage dans le corps humain[5].

La vitamine B6 est nécessaire au développement cérébral et cognitif, du stade fœtal à l'enfance, en participant à la synthèse des neurotransmetteurs. De même, elle joue un rôle dans la synthèse de l'hème et la formation de l'hémoglobine. Enfin elle participe aux fonctions immunitaires lors de la production de l'interleukine-2[5].

Chez les végétaux, la B6 contribue à la biosynthèse de la chlorophylle[4].

Sources

Elle est présente en quantités importantes dans les produits animaux comme les volailles, poissons, foies (bœuf, agneau, veau) ; et les produits végétaux comme les pois et céréales, le soja et les noix, les bananes[6],[7].

Par exemple, pour 100 g de produit : germe de blé (3,3 mg de B6), sardine (1), foie de veau (0,9), riz non poli (0,7), thon (0,5), œuf de poule (0,1)[7].

L'apport quotidien conseillé est de l'ordre de 1,5 à 1,8 mg par jour (homme, femme, adultes, France)[7], de 1 à 2 mg par jour (enfant de 3-13 ans, femme allaitante, États-Unis)[5].

Le régime occidental standard offre un apport nettement supérieur aux besoins, puisqu'il serait de l'ordre de 6 à 10 mg par jour[5].

La limite de sécurité (pour la supplémentation en sus des apports conseillés) est de 5 mg par jour[7], ce qui correspond à l'enfant de 1 à 3 ans selon l'EFFSA, cette limite étant à 25 mg par jour pour l'adulte[8].

La B6 est présente dans la plupart des compléments alimentaires et produits enrichis en vitamines. Un surdosage en vitamine B6 peut se manifester par une neuropathie, pour des doses supérieures à 250 ou 500 mg par jour[5],[6].

Carence

Sujets à risques

Le déficit isolé de B6 est rare, il est le plus souvent associé à d'autres déficits vitaminiques, notamment ceux des autres vitamines B.

Dans les pays développés, la carence en B6 fait partie des carences multiples pouvant survenir chez l'alcoolique chronique. Des taux bas de vitamine B6 peuvent se retrouver dans des états d'obésité, de grossesse, ou de malabsorption intestinale (maladie cœliaque, maladies inflammatoires de l'intestin, chirurgie digestive...)[5].

Les autres affections à risques de déficit sont l'insuffisance rénale (notamment les dialysés) et les maladies auto-immunes (comme l'arthrite rhumatoïde).

Des médicaments peuvent interférer avec le métabolisme de la B6 en agissant comme des antagonistes. Les principaux sont l'izoniazide, la penicillamine et la levodopa[5].

Pathologies

Chez l'adulte, notamment alcoolique chronique, on peut observer des polynévrites sensitives et des troubles psychiques (dont la dépression). Des atteintes cutanées, démangeaisons, atteintes des lèvres (chéilite) et de la langue (glossite) peuvent se voir, ainsi qu'une anémie normocytaire ou microcytaire non spécifique[3],[5].

Chez l'enfant, une carence ou un déficit sévère en B6 peut provoquer des crises convulsives.

Il existe aussi une maladie très rare, liée à un trouble métabolique congénital, à transmission autosomique récessive, dite épilepsie pyridoxino-dépendante du nouveau-né et du nourrisson, qui ne répond pas aux agents anti-convulsivants habituels, mais qui répond à la vitamine B6[9].

Utilisation thérapeutique

Des études sont en cours de discussion pour évaluer le rôle d'un déficit en B6 dans les maladies cardio-vasculaires, le cancer ou le déclin cognitif. En 2018, il n'existe pas de données suffisantes pour proposer une supplémentation préventive dans ces affections (en sus de l'apport quotidien recommandé)[5].

Quelques études indiquent cependant qu'une supplémentation en B6 pourrait améliorer le syndrome prémenstruel. The American College of Obstetrics and Gynecology recommande une supplémentation (1,9 mg par jour) contre les nausées et vomissements de la grossesse[5].

En toxicologie, la B6 est utilisée comme antidote d'urgence lors d'intoxications médicamenteuses (isoniazide), par éthylène-glycol, et par des champignons contenant de la gyromitrine[5] comme la fausse morille.

Associée à la cystine, la B6 est aussi présentée comme favorisant le développement des phanères (cheveux, ongles...).

Une certain forme de la vitamine B6 (la pryxidoxine) est utilisée comme traitement des anémies sidéroblastiques congénitales[10].

Notes et références

  1. (en) Kenneth F. Kiple (dir.) et Daphne A. Roe, The Cambridge World History of Food, vol. 1, Cambridge University Press, (ISBN 0-521-40214-X), chap. IV.A.2 (« Vitamin B Complex »), p. 752-753.
  2. Irwin H. Rosenberg, « A history of the isolation and identification of vitamin B(6) », Annals of Nutrition & Metabolism, vol. 61, no 3, , p. 236–238 (ISSN 1421-9697, PMID 23183295, DOI 10.1159/000343113, lire en ligne, consulté le 22 décembre 2018)
  3. J. Navarro, « Carences vitaminiques en pédiatrie », La Revue du Praticien, vol. 35, no 11, , p. 575-583.
  4. Marcelina Parra, Seth Stahl et Hanjo Hellmann, « Vitamin B6 and Its Role in Cell Metabolism and Physiology », Cells, vol. 7, no 7, (ISSN 2073-4409, PMID 30037155, PMCID PMC6071262, DOI 10.3390/cells7070084, lire en ligne, consulté le 23 décembre 2018)
  5. Mary J. Brown et Kevin Beier, « Vitamin B6 Deficiency (Pyridoxine) », dans StatPearls, StatPearls Publishing, (PMID 29261855, lire en ligne)
  6. (en) Kathleen M. Fairfield, « Vitamins for Chronic Disease Prevention in Adults, Scientific Review », Journal of the American Medical Association, vol. 287, no 23, , p. 3116-3124
  7. Jean-Claude Guilland, « Qu'est-ce que une vitamine ? », La Revue du Praticien, vol. 63, no 8, , p. 1060-1069.
  8. « Tolerable upper intake levels (voir page 41) », sur efsa.europa.eu, (consulté le 6 janvier 2019)
  9. Sidney M. Gospe, « Pyridoxine-Dependent Epilepsy », dans GeneReviews®, University of Washington, Seattle, (PMID 20301659, lire en ligne)
  10. Anémies sidéroblastiques - Hématocell.fr

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