Inflammation

L'inflammation est la réaction du système immunitaire stéréotypée à une agression externe (infection, trauma, brûlure, allergie, etc) ou interne (cellules cancéreuses). C'est un processus dit ubiquitaire ou universel qui concerne tous les tissus, faisant intervenir l'immunité innée et l'immunité adaptative.

L'inflammation chronique est une réponse à de nombreuses transformations de l'environnement et du comportement modernes (elle est favorisée par la sédentarité, la malbouffe, la pollution, les altérations du microbiote humain) et un facteur important dans le développement de maladies de civilisation telles que la résistance à l'insuline, l'obésité, les maladies cardiovasculaires, les maladies immunitaires, et même les troubles de l'humeur et du comportement[1].

Un abcès sur la peau, montrant une zone rougie correspondant à l’inflammation. Un cercle de tissus nécrosés est présent ainsi que du pus.
Orteil infecté présentant une inflammation aiguë (rougeur et œdème).

Symptômes et signes biologiques

Signes et symptômes physiques

L’inflammation peut se manifester par :

  • une rougeur (érythème correspondant à une vasodilatation locale) ;
  • un gonflement (œdème) ;
  • une sensation de chaleur ;
  • une douleur qui semble pulser ;
  • une éventuelle altération du fonctionnement de l’organe concerné (ex : difficulté à bouger (impotence fonctionnelle) dans le cas d'une articulation).

On fait parfois référence aux noms latins, notamment dans les langues étrangères, pour décrire les manifestations de l’inflammation. Ces manifestations ont été décrites il y a 2 000 ans par Celsus : rubor (rougeur), calor (chaleur), tumor (gonflement), dolor (douleur), functio laesa (impotence fonctionnelle). Si l’inflammation est connue depuis l’Antiquité, l’impotence fonctionnelle a été rajoutée à sa définition par Rudolf Virchow en 1858.

Signes biologiques

Le phénomène inflammatoire s'accompange de modifications biologiques tels que l'augmentation de la concentration sanguine de plusieurs protéines telles que l'haptoglobine, la céruloplasmine, des globulines, ou la protéine C réactive (CRP). Une électrophorèse des protéines plasmatiques permet d'objectiver ces changement dans leur globalité.
L'élévation des « protéines inflammatoires » accroit la vitesse de sédimentation.

La ferritine augmente, reflétant la séquestration tissulaire du fer sérique. Cette séquestration est secondaire à l'augmentation de la sécrétion d'hepcidine, médiée notamment par l'interleukine 6. Cette séquestration est un des facteurs concourant à l'installation d'une anémie sur le long terme (anémie inflammatoire).

Dans certains cas, une polynucléose neutrophile est présente.

Mécanisme inflammatoire

Il existe trois temps à l'inflammation :

Phase vasculaire ou vasculo-exsudative

Elle est déclenchée par l'action de médiateurs chimiques, on constate :

  1. La libération d'amines vaso-actives préformées par les mastocytes (histamine et sérotonine).
  2. L'activation de protéines plasmatiques inactives (facteur XII (Hageman), bradykinine, kallikréine, complément).
  3. La sécrétion de médiateurs lipidiques (prostaglandines dont prostacycline, leucotriènes, facteur d'activation plaquettaire (PAF)).

Cette première phase comporte trois phénomènes.

Congestion active

Sous l'influence de médiateurs chimiques, les cellules endothéliales (formant les vaisseaux sanguins) s'activent. Cela entraîne une vasodilatation locale artériolaire puis capillaire[2] qui provoque :

  1. une augmentation de l'apport sanguin
  2. une diminution de la vitesse du flux sanguin

Ce gonflement local des vaisseaux sanguins provoque la rougeur et la sensation de chaleur. Il a pour but d’augmenter la circulation du sang afin d’évacuer les cellules mortes et les toxines (détersion), et d’apporter les éléments nécessaires à la guérison, notamment des globules blancs pour combattre les corps étrangers.

Parallèlement à la congestion active, les cellules endothéliales activées expriment des molécules d'adhésion (nécessaires à la diapédèse) tandis que le vaisseau devient plus perméable (épanchement de l’eau du plasma sanguin par osmose vers les tissus, ce qui provoque l’œdème).

Œdème inflammatoire

L’œdème inflammatoire est la conséquence du passage du plasma (plus précisément d'un exsudat) dans la zone lésée. Il se traduit par un gonflement du tissu touché et comprime les nerfs alentour provoquant la sensation douloureuse et les démangeaisons.

Il a plusieurs rôles : il permet l'apport jusqu'à la lésion de moyens de défense (immunoglobulines, protéines du complément..), la dilution de l'agent pathogène et la limitation du foyer inflammatoire.

Diapédèse leucocytaire

Migration des leucocytes pendant une réaction inflammatoire

La diapédèse leucocytaire est le phénomène permettant le passage des leucocytes de la circulation sanguine jusqu'au foyer de l'inflammation. On peut distinguer trois étapes différentes :

  1. Margination leucocytaire.
  2. Rolling : interaction des leucocytes et des cellules endothéliales par l'intermédiaire de sélectines.
  3. Diapédèse : passage de la paroi endothéliale par les leucocytes qui commence par l'adhésion cellulaire par l'intermédiaire des intégrines et de molécules d'adhésion (ICAM : en anglais Intercellular adhesion molecule).

Phase cellulaire

La phase cellulaire fait suite à la diapédèse, lorsque les leucocytes sont amassés dans le tissu interstitiel.

Elle correspond à la formation du granulome inflammatoire[Note 1]. Il participe à la détersion (rôle des granulocytes et des macrophages) et permet le développement de la réaction immunitaire adaptative. Les cellules composant le granulome ont également un rôle de sécrétion de médiateurs chimiques.

Résolution

Il s'agit enfin de l'arrêt du processus inflammatoire. La résolution de l'inflammation nécessite au niveau local plusieurs conditions :

  1. L'arrêt de l'agression est la condition principale pour l'arrêt de l'inflammation.
  2. L'action de molécules anti-inflammatoires, étroitement intriquée avec des facteurs cellulaires (les cellules sécrètent ces molécules et sont à la fois sous leur dépendance[Note 2]). Parmi ces molécules anti-inflammatoires, on peut citer les cytokines IL-4, IL-10 et IL-13 et les lipides résolvine, protectine, marésine et lipoxine[Note 3].

Au niveau de l'organisme (niveau dit systémique), une stimulation de l'axe hypothalamo-hypophysaire corticotrope entraîne la production de cortisol puis de glucocorticoïde (les corticoïdes sont de puissants anti-inflammatoires).

Si l'inflammation s'arrête à ce stade, elle est qualifiée d'inflammation aiguë. Si cette phase fait défaut, une inflammation chronique peut s'installer.

Inflammation et pathologies

Des études récentes ont lié l'inflammation chronique à plusieurs types de pathologies, dites « maladies de civilisation » : maladies cardio-vasculaires, diabète et obésité[3]...

L'état inflammatoire chronique est reconnu favoriser le développement des tumeurs et a fortiori des tumeurs cancéreuses[4],[5].

Lutte contre l'inflammation

L’inflammation, est une réaction de défense généralement bénéfique, mais pose parfois problème, par la douleur qu'elle engendre ou lorsqu'elle perdure et devient chronique, risquant alors de nuire à la structure ainsi qu'a la fonction de l'organe touché.

Moyens thérapeutiques

Le froid (glace à travers un tissu par exemple) suffit parfois à combattre l’inflammation (il induite une vasoconstriction, diminuant l’œdème et calme la douleur).

Des médicaments anti-inflammatoires peuvent calmer les symptômes ou limiter les effets délétères de l'inflammation sur l'organisme. On distingue les anti-inflammatoires non stéroïdiens et les glucocorticoïdes. Ces médicaments existent sous de nombreuses formes (orale, suppositoire, inhalation, perfusion ou bien locale par pommade, collyre...) selon les indications.

Des thérapies récentes (biothérapies) bloquent spécifiquement certains médiateurs de l'inflammation (anti-TNFα, anti-IL4...). Elles ont révolutionné la prise en charge de maladies inflammatoires telles que la polyarthrite rhumathoïde ou les spondylarthrites ankylosantes mais avec des effets secondaires.

Mode de vie et alimentation

Certains aliments contribuent à réduire l'inflammation - ou ses marqueurs sanguins -, en particulier les omega-3[6],[7],[8],[9] (contenus dans les poissons gras et l'huile de lin ou de colza par exemple), les anthocyanes (contenus dans les fruits rouges et la betterave par exemple), le bêta-glucane (contenu par l'avoine et les grains entiers par exemple), le riz complet[10], le thym, le curcuma[11], le gingembre[12], le chou, l'ananas, l'huile d'olive[13], les noix, l'ail[14], les oignons[15]. À l'inverse, les aliments à fort indice glycémique (sucre, amidon par exemple), et les matières grasses animales semblent contribuer à augmenter ces marqueurs sanguins[16].

La restriction calorique semble réduire l'inflammation. Dans une étude de restriction calorique portant sur 218 personnes pendant 2 ans, dénommée CALERIE[17], le taux de Protéine C réactive a baissé de 47 %.

Types d’inflammation

Selon la persistance de l'inflammation

Selon la morphologie du foyer inflammatoire

Localisation

Selon l’endroit où est située l’inflammation, elle peut prendre différents noms, en général en -ite :

Notes et références

Références

  1. SL Prescott, « Early-life environmental determinants of allergic diseases and the wider pandemic of inflammatory noncommunicable diseases », J Allergy Clin Immunol, vol. 131, no 1, , p. 23-30. (PMID 23265694, DOI 10.1016/j.jaci.2012.11.019)
  2. « Cours », sur campus.cerimes.fr (consulté le 27 janvier 2016)
  3. « L’inflammation, une immunité innée qui s’est retournée contre l’humanité », Le Monde, (lire en ligne, consulté le 14 mai 2019)
  4. (en) Fran Balkwill et Alberto Mantovani, « Inflammation and cancer: back to Virchow? », The Lancet, vol. 357, p. 539-545 PMID 11229684
  5. (en) « Inflammation–cancer link confirmed », Nature Reviews Immunology 2008;8(7):494. DOI:10.1038/nri2374
  6. Effects of selected bioactive food compounds on human white adipocyte function.
  7. Shahida A. Khan, Ashraf Ali, Sarah A. Khan et Solafa A. Zahran, « Unraveling the complex relationship triad between lipids, obesity, and inflammation », Mediators of Inflammation, vol. 2014, , p. 502749 (ISSN 1466-1861, PMID 25258478, PMCID 4166426, DOI 10.1155/2014/502749, lire en ligne, consulté le 28 janvier 2016)
  8. (en) Bello KJ, Fang H, Fazeli P, Bolad W, Corretti M, Magder LS, Petri M, « Omega-3 in SLE: a double-blind, placebo-controlled randomized clinical trial of endothelial dysfunction and disease activity in systemic lupus erythematosus », Rheumatol International,
  9. (en) Kiecolt-Glaser JK, Belury MA, Andridge R, Malarkey WB, Glaser R, « Omega-3 supplementation lowers inflammation and anxiety in medical students: a randomized controlled trial », Brain Behav Immun.,
  10. Effect of Brown Rice Consumption on Inflammatory Marker and Cardiovascular Risk Factors among Overweight and Obese Non-menopausal Female Adults
  11. Curcumin: an anti-inflammatory molecule from a curry spice on the path to cancer treatment
  12. Ginger Extract (Zingiber Officinale) has Anti-Cancer and Anti-Inflammatory Effects on Ethionine-Induced Hepatoma Rats
  13. Effects of Olive Oil on Markers of Inflammation and Endothelial Function—A Systematic Review and Meta-Analysis
  14. Antihyperglycemic, antihyperlipidemic, anti-inflammatory and adenosine deaminase– lowering effects of garlic in patients with type 2 diabetes mellitus with obesity
  15. Foods that fight inflammation, Harvard Medical School
  16. Association between carbohydrate quality and inflammatory markers: systematic review of observational and interventional studies
  17. NIH study finds calorie restriction lowers some risk factors for age-related diseases

Notes

  1. La présence d'un granulome inflammatoire ne signifie pas qu'il s'agit d'une inflammation granulomateuse, caractérisée par la présence de cellules géantes et de cellules épithélioïdes
  2. L'état des cellules a aussi une importance : par exemple, la phagocytose de corps apoptotiques est généralement anti-inflammatoire, permettant la formation de macrophages sécrétant des molécules anti-inflammatoires. Au contraire, la phagocytose de fragments de cellules en nécrose est pro-inflammatoire
  3. Ces lipides sont dérivés de l'acide arachidonique

Voir aussi

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